Motivés ! Motivés... Motivés ?
Un accompagnement thérapeutique est un peu une danse à deux entre le patient1 et le thérapeute. Une danse reposant sur une notion de collaboration dont la direction à suivre est le mieux-être et la santé du patient. L’entretien motivationnel constitue une feuille de route fort utile pour garder le cap et se diriger vers la réussite.
Par Virginie Landemaine
Développé dans les années 80 par les psychologues William Miller et Stephen Rollnick, l’entretien motivationnel est “un entretien guidé centré sur le patient pour l’encourager à changer de comportement en l’aidant à explorer et à résoudre son ambivalence face au changement”.
Qu’il s’agisse d’arrêter le tabac, de perdre du poids ou de mieux gérer son stress par exemple, lorsqu’un patient consulte un thérapeute, il exprime son désir de prendre soin de lui pour aller mieux, se sentir bien et être en bonne santé. Reste que les choses ne sont pas toujours aussi simples et évidentes.
Vouloir le changement ou ne pas le vouloir : telle est la question...
Comment accompagner en effet un patient dans sa démarche vers un changement positif lorsque celui-ci doit composer avec une ambivalence plus ou moins consciente autour de cette notion de changement ?
Comment accompagner au mieux un patient lorsqu’il émet des réserves, souvent de façon inconsciente, face au changement majeur que représente l’arrêt du tabac pour lui ? Arrêter le tabac, c’est en effet arrêter les moments de convivialité lors d’une soirée, au cours d’une pause avec des amis, des collègues. C’est mettre fin à certains rituels (une cigarette avec le café après déjeuner, dès le matin, quand le stress pointe…). Bref, le changement implique de nouvelles habitudes à prendre, et cette perspective peut freiner la dynamique de changement justement.
Alors comment faire en sorte qu’une thérapie se déroule au mieux pour chacun, et surtout pour le patient ?
Au cours de l’entretien motivationnel, le thérapeute peut adopter une écoute reflet ou miroir empathique. Autrement dit, être dans une attitude d’écoute attentive, chaleureuse et authentique tout en reflétant au patient son discours dans le but de susciter une réaction. Le thérapeute peut ainsi choisir de minimiser le discours du patient, lui offrant ainsi l’espace nécessaire pour le renforcer (finalement, fumer un paquet de cigarettes par jour, ce n’est pas non plus si grave que ça !). Il peut à l’inverse sur-évaluer, avec l’objectif d’entraîner une critique du patient lui-même (en continuant ainsi, vous risquez de développer de sérieuses pathologies, votre capacité respiratoire va être diminuée, votre peau va devenir plus sèche, votre teint terne…).
Avant de commencer l’entretien, il importe de cadrer le déroulé de la séance afin d’éviter toute source d’incompréhension. Il peut d’ailleurs être intéressant de débuter une séance en invitant le patient à dévoiler ce dont il aurait envie de parler et quelles sont ses attentes. Le thérapeute peut également, en quelques mots, clarifier le rôle de chacun.
« Quand quelqu’un désire la santé, il faut d’abord lui demander s’il est prêt à supprimer les causes de sa maladie. Alors seulement est-il possible de l’aider. » Hippocrate
L’idée étant de favoriser le changement en plaçant le patient au cœur de la dynamique, il importe de créer les conditions propices à cette perspective. Les questions invitant le patient à imaginer sa vie dans un ou deux ans par exemple sont une porte d’entrée possible. De même que les questions l’amenant à s’interroger sur ce qu’il se passera si rien ne change dans son quotidien. Ou encore l’interroger sur ce qu’il aimerait qu’il se produise dans sa vie, en faisant abstraction de « quand ?», « où ? » et « comment ? ».
Thérapeute, ne sous-estimez pas votre rôle ! Vous possédez, non pas ce pouvoir, mais cette capacité de faire germer les graines d’un changement positif dans l’esprit de votre patient. Et ces graines sont d’autant plus importantes que votre patient est ambivalent, et fait face à la fois à ce désir de changement pour améliorer son bien-être et / ou sa santé, et à cette peur de changer avec ce que cela implique en termes de gestion de l’inconnu.
« Identifier les leviers de la réussite »
L’entretien motivationnel consiste ainsi à enraciner, de façon bienveillante et avec une confiance sans failles, la croyance que le patient dispose des ressources pour réaliser ce changement.
Pour autant, le changement ne pourra réellement se produire qu’à l’aide d’un déclic. Tant que la situation demeure acceptable pour le patient, le changement n’a que peu de chances d’arriver. D’où la nécessité de confronter la situation vécue actuellement et une situation antérieure ou une situation idéale désirée.
Pour Laurence Cerné, praticienne naturopathe, l'essentiel est d'abord :
« d’identifier les habitudes du client pour être en capacité de le conduire vers un changement bénéfique. Même si l’envie de changer est bien présente, les personnes que j’accompagne sont souvent confrontées à de nombreuses résistances, des croyances telles que « j’ai été élevé comme ça » ou « c’est de famille ! » qui viennent peser sur la motivation. Toute la difficulté, en tant que praticien, consiste donc à identifier rapidement les ressources du client : ce qu’il aime, ce qu’il n’aime pas. On sait tous par exemple qu’il faut faire du sport, ne pas fumer, mieux manger, mais pourquoi le fait-on et comment peut-on le mettre en pratique ? Identifier les leviers de la réussite au niveau de l’alimentation, l’activité physique et l’émotionnel constitue l’un des piliers de la naturopathie. À titre d’exemple, si mon client, comme 9 francais sur 10, prend un petit-déjeuner sucré, nous allons modifier ses habitudes progressivement, et surtout ne pas y aller en frontal. Une fois que ce repas sera stabilisé, nous irons voir les autres repas. De même pour les personnes qui mangent beaucoup de viande, nous allons discuter, travailler sur les idées pré-conçues, la culture, l’éducation… »
Enfin, ne pas oublier qu’un changement quel qu’il soit demande de la persévérance, de la détermination, de la confiance et beaucoup de courage.
1 : Nous utilisons plutôt le terme “client” concernant les thérapies complémentaires, “patient” étant un terme réservé aux pratiques médicales conventionnelles.
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